Le mot “émotion” vient du latin “emovere” qui signifie mouvement en français ancien. Une émotion est donc une énergie qui nous met en mouvement !
Le Larousse précise qu’il s’agit d’un « trouble subit et agitation passagère causés par un sentiment vif de peur, de surprise, de joie, etc. », mais certains spécialistes s’accordent sur le fait que l’émotion se définisse comme une agitation passagère face à une nouvelle situation, et que lorsque des stresseurs viennent perturber l’équilibre, différents circuits neurobiologiques sont sollicités pour permettre le retour à l’homéostasie, amenant le changement à court terme du comportement. L’émotion est donc la réaction à court terme qui permet à l’individu de s’adapter à son environnement en maintenant son équilibre.
La notion a-t-elle évoluée dans l’histoire ?
Le mot « émotion » tel que nous le connaissons, n’apparaît qu’au 16ème siècle. Auparavant, il était utilisé avec le verbe « émouvoir » dans un contexte de description d’un déplacement (illustration : quand Jean de Joinville parle de Saint Louis, il dit : « Il s’est ému d’Antioche à Jérusalem. »).
A la fin du Moyen Âge, ce verbe fait place à plus d’intériorité pour décrire un choc psychologique plutôt qu’un simple phénomène de déplacement (illustration : cet homme « s’est ému de la voir », à propos d’une femme)
Aujourd’hui, au sens strict, le terme « émotion » définit le choc subit face à un phénomène. Il envahit brusquement l’individu, le traverse, et provoque jusqu’à la sidération, l’envahissement total. Pour faire une histoire des émotions, il vaut mieux parler de la résonance que ce choc a sur les individus, avec par exemple la notion de trauma émotionnel apparue au 19e siècle. Désormais, le terme « émotion » s’intéresse alors plus à l’affect qu’au choc lui-même.
La perception des émotions change-t-elle avec l’histoire ?
Pour les historiens, il est très difficile de retrouver et retracer la forme et l’intensité de ce qui a été éprouvé dans le for intérieur des personnages du passé.
L’historien français Lucien Febvre, considéré comme un précurseur de l’histoire des émotions, invita en 1941, les historiens à mettre les émotions au centre de leur travail. Selon lui, elles sont alors déjà présentes dans les récits historiques, mais de manière imprécise et anachronique (par exemple, lorsqu’il est dit que Napoléon a un accès de rage : qu’est-ce que la rage au XIXe siècle ? comment est-elle exprimée ? …). Il considère que sans comprendre les émotions d’un point de vue historique, il n’est pas possible de vraiment comprendre l’histoire.
Cependant, de grandes transformations du processus émotionnel dans l’histoire ont pu être identifiées. Les émotions ne sont donc pas invariables et universelles.
D’abord, le sens même des émotions peut aller jusqu’à s’inverser dans le temps. Dans l’Antiquité grecque, la colère de Zeus était perçue comme légitime et même nécessaire. Aujourd’hui, la démocratie ne supporte pas le fait qu’un dirigeant puisse agir de manière colérique à l’égard du citoyen. Les émotions peuvent donc changer de valeur.
Par ailleurs, le spectre émotionnel s’est progressivement enrichi. Au moyen âge, les émotions portaient plus sur ce qui pouvait émouvoir comme le gout pour la guerre, la danse, la poésie ou les phénomènes amoureux. Avec le temps, le phénomène émotionnel touche nos ressentis intérieurs, et insensiblement, entre dans des processus de contrôle, d’euphémisation. Ce qui devient de plus en plus valorisé, c’est le fait de savoir se contrôler, de ne pas se laisser déborder ou envahir. La psychanalyse en est un très bel exemple.